Au Sahel, les terroristes du Jnim ont assis leur contrôle par le biais de l’économie illicite
Commerce de carburant, de motos, de médicaments, racket d’éleveurs et de transporteurs… Le ama’at Nusrat al-Islam wal Muslimeen (Jnim) est progressivement devenu un acteur central et un bénéficiaire majeur des trafics qui se déroulent dans ses zones d’influence, partagées principalement entre le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Entre 60 et 70% du Burkina Faso sont sous la coupe des jihadistes et de larges pans du territoire malien échappent toujours au contrôle de l’État, selon plusieurs études.
Depuis 2022, ce groupe terroriste jihadiste lié à al-Qaïda a renforcé son emprise économique et sa gouvernance locale dans les régions où il est actif. C’est ce qu’a conclu l’ONG Global Initiative dans un rapport publié hier. Le groupe continue d’étendre son contrôle sur les trafics et les routes commerciales, misant de plus en plus sur ces économies illicites pour asseoir son influence.
Une pénurie de carburant au Mali
Au Burkina Faso, plusieurs villes du centre et du nord vivent sous leur blocus et les ravitaillements de l’armée sont régulièrement pris pour cible. C’est le cas de la commune d’Arbinda, isolée depuis plusieurs mois. « Arbinda vit une crise alimentaire. Les populations souffrent d’un manque de vivres et de produits de première nécessité », explique un habitant.
Au Mali, depuis septembre, le Jnim a démultiplié ses attaques dans l’ouest et le sud du Mali en instaurant un blocus sur les produits pétroliers, occasionnant une pénurie de carburant. Chaque entrée dans Bamako de camions-citernes escortés par l’armée est devenue un exploit. Ces activités fournissent aux jihadistes des ressources et des financements, assure Global Initiative. Parmi les axes routiers stratégiques qu’il contrôle figurent les corridors transfrontaliers du complexe W-Arly-Pendjari, une réserve naturelle à cheval entre le Burkina Faso, le Niger et le Bénin.
De l’argent, de l’influence et de la légitimité
Ces activités illicites constituent pour le Jnim une véritable économie de guerre. Elles génèrent des ressources financières qui réduisent sa dépendance à des financements extérieurs. Mais l’enjeu ne se limite pas à l’argent, le groupe étend ainsi son emprise sur l’économie locale et, dans certaines zones, en restructure les mécanismes. D’après les auteurs du rapport, cette stratégie permet au Jnim de tisser des liens avec les communautés locales et de renforcer sa légitimité. Dans plusieurs régions, le groupe terroriste assure une forme de « protection » et de « justice », en échange d’impôts.
L’orpaillage artisanal occupe également une place importante dans cette stratégie. Le Jnim aurait, selon l’organisation Global Initiative, « démocratisé l’accès aux ressources aurifères », dans de nombreuses zones sous son influence — notamment au Burkina Faso, où certaines sociétés minières auraient conclu des accords avec des groupes jihadistes pour poursuivre leurs activités.
Source : rfi