Le dauphin constitutionnel est-il nécessaire ? Par Ely Krembella
Les jours et les nuits se succèdent, depuis toujours, comme quoi le soleil se lève à l’Est et se couche à l’ouest, un perpétuel écoulement des phénomènes physiques ou métaphysiques dont Seul ALLAH peut changer le cours. Allah a créé ce cycle immuable et ordonné, tout en transmettant Sa Volonté et Ses Recommandations à l’espèce humaine sur un petit point de l’univers qu’est notre planète-terre. Mais les pendules de l’horloge de l’homo sapiens ou homme pensant, de surcroît mortel, n’ont pas souvent coïncidé avec celles de son démiurge, puissance transcendantale, omnisciente, éternelle et immortelle. L’être humain, puisque c’est de lui qu’il s’agira toujours, malgré les enseignements liturgiques, canoniques, voire eschatologiques même, malgré les récits des événements du passé et qui devraient lui servir de leçons, se nourrit peu ou prou des expériences précédentes. Au contraire, face au réalisme empirique qui devait lui servir encore une fois de jalons lanceurs d’alerte, le moment fatidique où il est tenu de prendre des décisions a postériori graves de conséquences, la pauvre créature se complaît à sa forfaiture. Certes, personne ne sait de ce que demain sera fait. Nous nous projetons constamment vers l’absurde, le plus souvent sans cogiter, cependant que la raison est la chose la mieux partager au monde selon Descartes dans son « discours de la Méthode ». Aussi être une conscience qui agit, c’est « s’éclater vers l’avenir » disait également un autre penseur. L’avenir est un futur inconnu, qui peut-être cerné aussi de surprises… souvent désagréables voire même néfastes. Notre Histoire politique ne peut démentir…. Puisque la plus part du temps nos agissements qu’on croyait salutaires, sont hélas porteurs des germes de notre propre anéantissement !!! Ah si Maawiya savait que Mohamed Ould Abdel Aziz allait le renverser un jour du 3 Août 2005, il l’aurait jamais mis à la tête du fameux bataillon de sa sécurité présidentielle, crée suite à la seule volonté de Ould Taya, lui-même !!! Certainement que Maawiya voyait en Aziz un « jeune bizgui « , ayant grandi au Sénégal, donc sans ambition et peu imprégné des éternelles palabres byzantines, ou des ambitions (teurche) démesurées voire incommodes des Beidhanes. D’autre part, Aziz n’est-il pas le cousin germain de feu Ely Ould Mohamed Vall, un proche parmi les « plus proches » (selon l’expression de Maawiya le jour du 12-12-2005) et qui le lui avait recommandé ? Ainsi, Aziz au moment de lâcher le pouvoir a porté son dévolu sur Mohamed Ould Ghazwani, après, semble-t-il un instant d’hésitation, puisque certains de ses « conseillers » lui préférant le Colonel Cheikh Ould Bayé comme dauphin. Dans l’imaginaire de Aziz, Ghazwani est « docile, sans ambition et foncièrement faible, donc il sera facile de le bouter du pouvoir en un temps record ». Parce que Aziz, n’a vu en Ghazwani durant plus de quarante ans que son côté » fair-play et consensuel ». C’est vraiment mal connaître Mohamed Ghazwani. Alors Aziz, aveuglé par ses projets d’avenir, n’a pas su faire la différence entre un homme éduqué, un officier certes discipliné avec ses chefs mais suffisant et mûr. Ce, n’avons-nous pas le droit de nous demander, qui va essayer de tromper Ghazwani à la fin de son second mandat ? Est-ce le guerrier Hanené Ould Sidi vêtu d’un manteau de marabout ou le presque marabout Ould Hweyrthi, endossant la carapace, cette fois de guerrier intrépide ? Et si ce n’était ni l’un ni l’autre ? Je connais peu, le ministre de l’Intérieur pour ne l’avoir jamais vu de mes propres yeux; par contre je connais l’actuel ministre de la Défense Nationale comme la poche de mon boubou bleu. Souvent le dauphin constitutionnel, c’est comme un orphelin qu’on a pris en charge, éduqué, nourri, cajolé et qui risque de se dresser contre vous, une fois qu’il se « croit » au sommet ; car c’est le seul moment où apparaîtra son vrai caractère. Mais il y a des exceptions, il arrive que la faute incombe aussi à ceux qui cèdent le pouvoir avec l’intention de revenir à l’impromptu, comme le cas de Mohamed Ould Abdel Aziz en 2019. C’est le cas aussi de Ahmadou Aidjo du Cameroun avec l’actuel président Paul Biya en 1981. Quand on cède le pouvoir, ce n’est plus la peine d’essayer de revenir par des subterfuges ou autres incommodités, en voulant surtout piétiner celui à qui vous l’avez concédé. Dans ce contexte, certaines questions dérangeantes sont cependant légitimes : que va-t-il se passer après le dernier mandat de Mohamed Ould Ghazwani, en 2029? Ne faudrait-il pas doubler d’ingéniosité suite à cette alternance pas comme les autres ? Fruit d’un pouvoir paisible, cette alternance ne risque-t-elle pas d’hériter d’une période d’instabilité, puisque les démons jadis endoloris par le marabout, voudront ils se déchaîner ? Enfin le président Ghazwani va-t-il choisir un dauphin constitutionnel ; si oui, qui choisir, un militaire ou un civil, une femme ou un mâle ?
A/ La paix sociale d’abord :
Au moment où j’écris ces notes, l’arène, le microcosme, politiques mauritaniens sont pacifiés. L’opposition, qui n’a pas le pouvoir pour ainsi étaler son programme, se contente de jouer son rôle avec le minimum de bruit afin de prouver qu’elle est d’abord responsable et qu’elle ne serait pas non plus à son dernier souffle. Voilà donc une belle occasion pour le pouvoir en place d’accomplir avec sérénité et latitude son programme électoral. Cependant toute cette atmosphère paisible émane de la volonté « stratégique » d’un seul homme, le président Mohamed Ould Ghazwani. Au vacarme du tambourinaire, il préfère le silence de la chouette, rapace solitaire et nocturne, mais agissant avec sagesse et dextérité, comme le légendaire oiseau de Minerve, symbole de toute une pensée philosophique. Cette philosophie d’exercice du pouvoir est vieille comme le temps, elle apaise, lobotomise tous les esprits, même les plus récalcitrants comme Biram Dah Abeid, Samba Thiam etc…. Cette posture a aussi ses inconvénients, après le calme, et l’habitude au calme, c’est le plus souvent la tempête. Mais les démons ne se déchaineront qu’après le départ du faiseur de paix. Les chroniqueurs maures estiment que seulement deux émirs dans l’espace beidane (j’ignore pour ceux du Fouta , du Walo et du Guidimagha) ont tenté d’ériger la paix, rien que la paix en exercice du pouvoir. Il s’agit de l’émir de l’Adrar Ahmed Ould Mhamed de 1872 à 1891. La légende dit que pendant le règne de cet émir, l’on pouvait déposer une carcasse de mouton bien cuite sur le dos d’un âne empruntant les ruelles étroites et les sentiers obscurs de l’émirat de l’Adrar, sans que personne ne tente de la subtiliser. La deuxième autorité est l’émir des Oulad Mbarek du Hodh Charghi, Khattri Ould Amar Ould Ely, au 18éme siècle. La même légende des récits maures dit que l’émir Khattri a fait régner la paix pendant presque un demi-siècle. L’anecdote de la femme Peulh vendeuse de lait caillé illustre bien cette période. En effet de jeunes guerriers d’Oulad MBarek de retour d’une razzia, s’en sont pris à une femme Peulh, versant son lait tout en la malmenant. La femme les interpella en ces mots: » osez maintenant, lamentables guerriers, puisque Khattri Ould Amar Ould Ely n’est plus de ce monde ». ..En 2025, les temps ont changé, Ghazwani tente d’apporter le calme et la sérénité, mais c’est sans compter sur la propension de la délinquance juvénile surtout, un phénomène de société répandu sur toute la planète, les réseaux sociaux aidant. Les habitants des quartiers populaires de Nouakchott ne me démentiront point. En tout cas, ce président, de par son éducation, sa quête de justice, son comportement spécifique à exercer le pouvoir, ne ménage aucun effort pour que ses citoyens vivent dans la quiétude. Le comportement d’un être humain lui confère le plus souvent un crédit de respect à son égard. L’actuel président Mohamed Ould Ghazwani est aussi fidèle en amitié. Il laisse rarement sur le carreau ceux qu’il a connus dans son adolescence, ou au cours de son riche service militaire. Etant président, il avait la possibilité de « disparaître des écrans » comme certains l’ont fait avant , à l’égard de leurs proches ou intimes. Nous demandons au président de regarder vers l’avenir avec beaucoup plus d’ingéniosité car le monde qui se métamorphose, ne répond plus aux normes éthiques dans lesquelles il a baigné dès son enfance. Au-delà de la guerre en Ukraine, imposée à la Russie par l’extension de l’Otan, du génocide perpétré à Gaza et qui a sans doute sonné le glas des « droits de l’homme », un thème cher aux occidentaux, il y a l’abominable attaque sur Doha hier et qui brouille toutes les cartes de la géopolitique traditionnelle. En effet le pouvoir sioniste n’a plus de limite et l’on se demande à présent, à qui le tour d’être frappé, l’Algérie, la Tunisie…? Et pour compléter ce tableau sombre, les terroristes du groupe Macina sont à quelques encablures de notre frontière et maintiennent un blocus contre les villes de Nioro du Sahel et Kayes, coupant les voies menant vers la Mauritanie et le Sénégal. Ces terroristes sont tellement proches de nos frontières que certains maliens nous soupçonnent de les héberger, alors qu’ils sont implantés sur le territoire du Mali. C’est une situation qu’il faut contrôler comme du lait sur le feu. Nos forces armées et de sécurité doivent rester vigilantes. Si ces terroristes parviennent à accomplir un seul forfait sur notre territoire, ils récidiveront, au risque de vouloir sanctuariser quelques pans de nos terres, comme ils le font déjà au Mali voisin. Le défi pour le pouvoir de Ghazwani d’ici 2029, c’est d’abord de contenir la menace terroriste, le long de nos frontières Sud-Est. Sans la sanctuarisation de notre intégrité territoriale, on ne peut appliquer aucun programme politique, dont la priorité est à la santé, la réforme de l’Ecole, l’Eau, l’Electricité et surtout les denrées de première nécessité pour le citoyen lambda.
B/ Le dauphin constitutionnel est-il nécessaire ? ( A suivre inchaAllah)
ELY SIDAHMED KROMBELE, FRANCE